GZA
Legend Of The Liquid Sword

Épéiste émérite du Clan, The Genius en est aussi le maître à penser aux côtés de l'incontournable Rza. Il est celui qui a aidé chacun des membres du Wu à fourbir ses armes avant la grande déferlante Shaolin, l'expert du placement de rimes qui dans l'ombre a œuvré pour le succès de l'entreprise sans jamais chercher à s'accaparer les médias... Le talent a toujours parlé pour lui. Chacune de ses (rares) apparitions au micro s'apparente en effet à un éclair de génie. Avec un classique indiscutable sous le bras "Liquid Swords" et un second album fort respectable "Beneath The Surface" (sans compter "Words From The Genius"), GZA est un des seuls membres du Wu à ne jamais nous avoir déçu. C'est donc avec appétit que l'on pose "Legend Of The Liquid Sword" sur la platine... surtout que GZA a été peu productif ces trois dernières années.

Comme à la grande époque du Wu-Tang, le LP démarre en trombe. Après une introduction qui nous explique mieux les raisons du titre de ce nouvel album, 'Autobio' frappe fort. Sur une boucle de piano discrète enluminée d'envolées de violons symphoniques, GZA nous raconte son histoire dans le hip-hop de manière détournée. La qualité de la production permet à GZA d'user de son flow magnétique et de son esprit vif pour nous fournir une nouvelle leçon. 'Did Ya Say That' continue sur cette bonne lancée avec sa structure évolutive et sa boucle d'orgue entraînante. Le Genius y affirme au passage son travail d'artisan de la rime hardcore ciselant avec attention son phrasé et ses mots en fonction de l'instrumental. Quand l'hypnotique 'Silent' touche à sa fin et que l'on y a entendu Gza croiser le fer avec Ghostface et Streetlife, on se dit que l'album est parti pour raviver la flamme fragile du Wu une fois pour toutes... Mais c'est sans compter sur la mauvaise volonté des producteurs.

En effet, si le travail de Gza est remarquable, celui de ses compositeurs l'est moins. Comme sur "Beneath The Surface", Arabian Knight est responsable de la majorité des productions. Si le minimalisme répétitif et la simplicité de ses programmations ont le mérite de mettre parfois en avant le talent brut de Gza, elles manquent de piment et nous plongent dans une routine lassante et peu créative. Surtout que le chevalier arabe a tendance a plomber ses instrus de notes synthétiques assez indigestes (voir à ce titre la pitoyable trompette Bontempi de 'Stay In Line'). Mais il n'est pas le seul à mériter un blâme. De manière générale, la production est en effet bien paresseuse. Jaz-O fait dans l'alimentaire avec son 'Legend Of The Liquid Sword' et les samples grillés sont légions. Sur 'Animal Planet', c'est ainsi Tyquan Walker qui pille éhontément Isaac Hayes sans le moindre ajout de valeur... Même Rza, qui n'a pourtant qu'un track à sa charge, livre un 'Rough Cut' sans queue ni tête et totalement aléatoire. Bref, rien de très reluisant passés les 4 premières plages. Mention quand même à Mathematics pour son 'Fam' et à DJ Muggs qui a su rendre honneur à son ami avec la bande-son angoissante d'un 'Luminal' où Gza fait le récit glaçant des exactions d'un serial killer.

Car, malgré la défection de ses producteurs, Gza fait bien le show et confirme son statut de maître des mots (aidé à de nombreuses reprises par d'autres membres du Clan). En dehors de ses habituelles puchlines à double sens et de ses pamphlets anti-wack emcees, il se livre ici à deux exercices de style brillants dans la tradition de 'Labels' et 'Publicity'. 'Animal Planet' est une longue métaphore filée soulevant les troublantes ressemblances entre la vie de rue et le monde animal. Le plus impressionnant exercice est cependant 'Fame' qui cite des centaines de noms de célébrités tout en les intégrant à la grammaire des rimes sans jamais perdre de vue le déroulement de l'histoire racontée. Une merveille d'écriture superbement bien tournée. C'est pourquoi on est encore plus énervés de voir Arabian Knight mettre cette perle dans un écrin en toc indigne de son éclat.

Lyricalement, "Legend Of The Liquid Sword" est un voyage épique qui nous ramène aux grandes heures du Wu mais, musicalement, il reste malheureusement cruellement ancré dans la période actuelle. Estimable mais loin de l'intensité dramatique et du génie d'un "Liquid Swords", ce nouvel album est donc en grande partie réservé au noyau dur des élèves de Shaolin.

Cobalt
Décembre 2002
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Label: MCA
Production: Arabian "Q-Base" Knight, Jay "Waxx" Garfield, Bink, RZA, DJ Muggs, Allah Mathematics, Jaz-O, Boola, Tyquan Walker, GZA
Année: Décembre 2002

01. Intro
02. Auto Bio
03. Did Ya Say That
04. Silent (feat. Ghostface Killah & Streetlife)
05. Knock, Knock
06. Stay In Line (feat. Santi White)
07. Animal Planet
08. Fam [Members Only] (feat. RZA & Masta Killah)
09. Legend Of The Liquid Sword (feat. Anthony Allen)
10. Fame
11. Highway Robbery (feat. Governor Two's)
12. Luminal
13. Sparring Minds (feat. Inspectah Deck)
14. Rough Cut (feat. Armel, Prodigal Sunn & 12 O'Clock)
15. Uncut Material

Best Cuts: 'Autobio', 'Silent', 'Did Ya Say That'

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